Depuis quelques semaines, le ministre Eric Besson remet l’identité nationale au cœur de la vie politique française en proposant d’obliger nos écoliers de chanter au moins une fois l’an l’hymne national. Je ne pense bien évidemment pas que ce débat ait quelque arrière-pensée électoraliste que ce soit, à l’approche des régionales…
Depuis deux semaines, je m’interroge, glanant quelque information, commentaire ou opinion sur cette proposition. Avant toute opinion, un brin d’histoire, la Marseillaise a été créée par Rouget de Lisle en 1792, en pleine Révolution quelques mois avant le début de la Terreur qui rappelons le était une guerre civile et une épuration des nobles par les Sans- Culottes ; ce chant s’appelait à l’origine « Chant de guerre de l’armée du Rhin », car notre hymne n’est pas marseillais mais strasbourgeois.
Depuis une trentaine d’années, des voix s’élèvent pour réformer, moderniser ce chant guerrier, la plus connue de ces voix reste Serge Gainsbourg et son « Aux armes et cetera » qui lui valut quelques bleus fait par des para alsaciens ; nul ne peut nier la violence de certains mots ou phrases, en effet le refrain comprend le célèbre « Qu’un sang impur abreuve nos sillons » et un couplet « Que tes ennemis expirants, voient ton triomphe et notre gloire ». Je ne suis pas un fervent partisan de notre hymne et encore moins de l’obligation de son apprentissage par cœur puis de son chant mais je suis en revanche profondément convaincu de la nécessité de le connaître et de le comprendre en le resituant dans son contexte historique. Obliger de chanter la Marseillaise sans un soupçon de pédagogie ou d’éducation civique serait à mon sens contre-productif, et ne créera absolument pas de sentiment national.
De là, se pose inévitablement la question de l’identité française, qu’est-ce être français en 2009 ? Je pense qu’être français, ce n’est pas nécessairement de connaître par cœur son hymne national, sa devise ou la liste des Présidents depuis Louis-Napoléon Bonaparte. En revanche, je suis persuadé qu’être français c’est de reconnaître un ensemble de valeurs, de lois communes, et de connaître son passé glorieux ou non. On ne doit pas occulter des pans d’histoire de France parce que ceux-ci ne sont pas en adéquation avec l’image de la grandeur de la France ; l’école de la république doit aborder les Croisades et les Guerres de religion avec leurs exactions, le colonialisme, l’évangélisation, l’épuration faite après la Seconde Guerre Mondiale sans oublier bien évidemment les tortures perpétrées pendant la Guerre d’Algérie voire toutes les guerres de décolonialisation.
Etre français c’est connaître le passé de notre vieille France dans son ensemble mais aussi respecter et se reconnaître dans un ensemble de valeurs et une culture, culture et valeurs qui nous caractérisent selon nos voisins et qui sont issues des Lumières et des grands philosophes de notre beau pays comme les droits de l’Homme, la liberté de conscience, d’expression de circulation, l’égalité entre hommes et femmes, entre les citoyens français, la laïcité qui protège le fait d’avoir une religion ou pas et de pouvoir la pratiquer sans entrave, la solidarité et l’humanisme qui vont de paire avec la fraternité et notre bon vieux droit du sol garantissant la nationalité à tout individu né sur le sol français peu importe sa couleur, son origine sociale ou sa confession.
En revanche, le fait d’avoir eu des ancêtres qui sont morts pour la France ne rend pas quelqu’un plus français qu’un autre, je ne me sens pas moins français parce qu’aucun de mes ancêtres n’a combattu pour le pays dans lequel vit ma famille depuis des siècles tout comme je ne me sens pas plus français qu’un français de la première génération.
L’identité nationale est un sentiment personnel, on nait français ou on le devient par choix en acceptant les valeurs et les lois de ce pays mais personne ne pourra m’obliger à être fier de mon pays ; je suis fier de mon pays parce que je connais sa construction, que je me reconnais dans son socle de valeurs, dans sa philosophie, sa culture et pas parce que je suis blanc, chrétien né en métropole, ou que je connais notre hymne national ou notre domaine dont je me demande combien d’entre nous connaissent la signification des trois couleurs.
Alors que tu t’appelles Hicham, Amadou, Jean-Marie ou Wang, que tu viennes de Dunkerque, Villiers le Bel, Vieux-Bourg ou Papeete, nous sommes tous français quitte à faire de la peine à certains.
Marc BC.
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